Pourquoi un chien ou un chat s’arrête-t-il soudainement de manger ?

Voir son animal repousser sa gamelle inquiète à juste titre. Pour un chien ou un chat, le refus de manger n’est jamais anodin. Dans la majorité des cas, ce comportement est le symptôme d’un trouble (passager ou grave) qui mérite d’être compris, pour mieux être accompagné. L’appétit, chez nos compagnons, est le reflet de leur état général, physique et émotionnel.

Des causes multiples, du banal au très grave

  • Le stress ou l’anxiété : un déménagement, l’arrivée d’un nouvel animal, des bruits inhabituels, un changement de routine ou même l’absence du maître peuvent couper l’appétit de façon passagère.
  • Un problème dentaire : abcès dentaires, gingivites douloureuses, fracture dentaire... Ces soucis sont sous-estimés : selon une étude de l’American Veterinary Dental College, 70% des chats et 80% des chiens de plus de 3 ans présentent des maladies bucco-dentaires.
  • Un trouble digestif : nausées, gastrites, corps étrangers, parasites intestinaux... La simple ingestion d’une plante toxique ou d’un aliment avarié peut suffire à provoquer un rejet de la nourriture.
  • Une maladie sous-jacente : infections, insuffisance rénale (notamment fréquente chez le chat âgé), maladies hépatiques, cancers, troubles hormonaux (diabète sucré, hyperthyroïdie)... De nombreuses pathologies peuvent entraîner une perte d’appétit.
  • Effet secondaire de médicaments : certains traitements (chimiothérapie, antibiotiques, antalgiques puissants...) peuvent altérer le goût ou déclencher des nausées.
  • Chaleur ou saison : durant les grosses chaleurs, l’appétit baisse naturellement chez beaucoup d’animaux, surtout s’ils restent sédentaires.
  • Vieillissement : un animal âgé peut perdre l’odorat, souffrir d’arthrose l’empêchant de se baisser, ou ressentir une lassitude alimentaire liée à la sénilité.

Quand faut-il s’inquiéter d’un refus d’alimentation ?

La durée du jeûne, l’âge et l’état de santé de l’animal sont les trois grands critères qui vont orienter la réponse. Certains cas doivent conduire à consulter sans attendre.

Combien de temps un animal peut-il rester sans manger ?

  • Un chat adulte en bonne santé : peut jeûner 24 à 36h sans danger immédiatement vital, mais au-delà, la situation devient préoccupante, surtout à cause du risque de lipidose hépatique (source: MSD Veterinary Manual). Chez le chat, un arrêt d’alimentation de 2 à 3 jours peut déjà abîmer le foie de façon irréversible.
  • Un chien adulte : tolère généralement 48h de jeûne, sauf cas particuliers (petites races, chiots). Un chien malade ou âgé est plus fragile et à surveiller étroitement.
  • Bébés, animaux âgés ou malades : au-delà de 12 à 24 h sans alimentation, risque vital élevé : il faut contacter un vétérinaire sans attendre.

La déshydratation arrive beaucoup plus vite encore : un animal qui ne boit pas, surtout s’il vomit ou a la diarrhée, relève de l’urgence vitale.

Les signes d’urgence à connaître absolument

  • Refus de manger ET de boire
  • Letargie inhabituelle
  • Vomissements ou diarrhées répétés
  • Gencives pâles ou jaunâtres
  • Respiration anormale (rapide, sifflante, laborieuse)
  • Perte de poids rapide ou abdomen gonflé douloureux
  • Saignement (nez, bouche, selles, urine)

Dès qu’un ou plusieurs de ces signes s’ajoutent au refus de s’alimenter, ne différer aucune consultation vétérinaire. Selon l’Ordre National des Vétérinaires, plus de 80% des prises en charge tardives sont liées à une sous-estimation des symptômes initiaux.

Ce qu’il faut éviter : les erreurs courantes face à un animal qui ne mange plus

  • Attendre trop longtemps : contrairement à ce que l’on croit, laisser “faire passer” ou “attendre son retour d’appétit” chez un animal mal en point peut aggraver son état de manière irréversible.
  • Changer brutalement l’alimentation : passer subitement à une nourriture “plus appétente” (pâtée, restes de table, friandises) ne règle jamais le problème de fond, et risque de déclencher des troubles digestifs secondaires.
  • Forcer l’animal à ingérer : gavage au doigt, insistance, menaces... Ces attitudes créent du stress, parfois des fausses routes ou des blessures, et coupent plus encore l’envie de manger.
  • Automédication dangereuse : donner des médicaments humains, de la cortisone ou des compléments sans avis vétérinaire présente des risques majeurs pour l’animal (toxicité, mauvais diagnostic...).
  • Laisser traîner la gamelle : une gamelle restée plusieurs heures attire les bactéries et désincite l’animal à se nourrir. Mieux vaut retirer et représenter la ration à heure fixe.

Les bons réflexes pour aider son animal et soutenir l’examen vétérinaire

Agir rapidement, c’est donner une vraie chance à l’animal de guérir. Quelques bons réflexes font parfois tout la différence avant la visite chez le professionnel.

  • Prendre la température : chez le chien et le chat, une température normale va de 38 à 39°C. Un animal fiévreux ou en hypothermie mérite une visite urgente.
  • Inspecter la bouche et le museau : vérifier l’absence de blessures, de douleurs, de masses anormales, de mauvaise odeur ou de dents cassées.
  • Consulter rapidement : détaillez à votre vétérinaire la durée et les circonstances du refus, les changements dans l’environnement, tout symptôme associé.
  • Hydrater si possible : en attendant la consultation, veillez à ce que l’animal ait toujours accès à une eau propre et fraîche. On peut aussi proposer de la soupe non salée ou une eau de cuisson de riz pour stimuler l’hydratation.
  • Observer l’environnement : cherchez le moindre élément inhabituel (vomi, restes suspects, plantes mâchonnées, potentiels toxiques).
  • Peser l’animal : si vous avez la possibilité de le peser, notez la variation de poids, même légère, pour aider le vétérinaire à évaluer la gravité.

Un diagnostic vétérinaire indispensable

Le vétérinaire commence généralement par une auscultation globale et un examen de la bouche, puis il pourra proposer :

  • Analyse sanguine (bilan hépato-rénal, glycémie, marqueurs d’infection, etc.)
  • Imagerie médicale si besoin (radiographie, échographie)
  • Examens spécifiques (test FIV/FeLV chez le chat, dosage hormonal, examen parasitaire des selles…)

Dans plus de 60% des cas de refus alimentaire complexes, l’imagerie (écho ou radio) retrouve soit un corps étranger, soit une masse digestive ou hépatique source (source : Anicura, Association Française de Médecine Vétérinaire).

Quelles solutions pour réouvrir l’appétit ?

Une fois la cause traitée ou écartée par le vétérinaire, il existe des astuces douces pour favoriser le retour à une alimentation normale, tout en douceur, sans forcer.

  • Rendre la nourriture plus appétente : chauffer légèrement la pâtée (et non les croquettes), ajouter une petite quantité de bouillon non salé, ou mêler temporairement des aliments très odorants (poulet cuit nature, thon au naturel, etc).
  • Fractionner les repas : proposer de petites quantités plus fréquemment : 4 repas sinon plus, pour éviter le dégoût lors d’un grand repas.
  • Maintenir une routine rassurante : présenter la gamelle toujours au même endroit, à heures fixes, sans sollicitation excessive, dans un coin calme loin des passages.
  • Surveiller l’hydratation : en parallèle du retour à l’alimentation, il est essentiel de stimuler la prise de boisson si le refus d’alimentation a duré plus de 24 à 48h.
  • Soutien par l’équipe vétérinaire : si l’animal refuse toujours de manger, la pose d’une sonde d’alimentation ou l’hospitalisation peuvent devenir nécessaires – cela relève de la médecine vétérinaire spécialisée.

Quand la psyché prend le dessus : la perte d’appétit liée au mal-être

Le refus de manger n’est pas que le symptôme d’une maladie physique chez l’animal : le chat, surtout, mais aussi certains chiens très sensibles, peuvent cesser de s’alimenter suite à un choc émotionnel, une angoisse ou un deuil (perte d’un autre animal, d’un membre du foyer, départ de son maître, déménagement...).

Chez le chat, la néophobie alimentaire – la peur de tout changement de nourriture ou d’environnement – rend toute nouveauté anxiogène au point de bloquer l’appétit parfois plusieurs jours.

  • Selon la Pet Food Manufacturers’ Association, près de 25% des chats hospitalisés refusent de manger exclusivement pour cause de stress environnemental.
  • Les chiens de famille abandonnés en refuge présentent un risque de refus alimentaire dix fois supérieur la première semaine, d’après une étude menée par le CNRS et la SPA.

Créer une bulle de calme, respecter le rythme de l’animal, éviter toute pression, et parfois faire appel à des solutions naturelles de soutien émotionnel (phéromones, compléments naturels adaptés) peut aider à débloquer le refus.

Le recours à un vétérinaire comportementaliste – ou à un éducateur certifié – doit être envisagé si le refus s’inscrit dans un contexte de souffrance psychique durable.

Ressources fiables et soutien en cas d'urgence

  • Numéro d'Urgence Vétérinaire : disponible dans la plupart des départements, 24h/24 (cherche en ligne “urgence vétérinaire + [nom département]”).
  • Ordre National des Vétérinaires : www.veterinaire.fr
  • Fiches pratiques sur la lipidose hépatique du chat et l’anorexie canine : Santé Vet, Association Française des Vétérinaires pour Animaux de Compagnie (www.afvac.com)
  • Aide pour adopter ou reloger un animal affaibli : Confiez-vous à une association locale, ou contactez la Fondation 30 millions d’amis.

Chaque cas unique, chaque vie mérite écoute et réactivité

Refuser de manger, chez un animal, n’est jamais insignifiant, mais reste toujours réversible plus facilement lorsqu’on ne laisse pas traîner. Oser faire appel tôt à un vétérinaire, réunir des informations claires, rassurer et protéger… Agir vite, avec détermination mais sans panique, sauve bien des existences silencieuses. Parce qu’un geste compte, la vigilance et l’empathie resteront toujours la meilleure des protections pour ceux qui ne savent pas parler.

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